Donc
mardi, en sortant de mon cours, j'achète une pizza au vendeur
ambulant garé devant la poste de Bazzecole sur Orges, j’en rêvais
de puis deux ans précis, et même sans doute plus et sans doute de
façon aussi précise que d'une personne en chair, ô décorative
pulsation, en effet, en cas d’absence d'une prostitué à un point
précis sur le bord de la route et qui a ses habitudes, on la cherche
des yeux, ...odeur envahissante qui appète justement du siège
arrière dans sa boîte plate « bon appétit pizza pizza -
bon appétit pizza pizza...», et réclame que l'on s'arrête
immédiatement sur le bas côté, d’autant plus qu’elle est
prédécoupée, je m’en apercevrais plus tard, la dévorer comme il
se doit dans les bois là haut lui faire son affaire..., je n’ai
pas de bière, boisson pour me désétouffer car ça étouffe vite
comme on la mange vite, ça me ferait presque peur de mourir comme
ça, et que malgré toute cette joie, c’est peu varié et que
surtout conséquence de la maladresse on a aucune habitude du
geste..., mais vraiment peu varié, mais alors, bouché de goût
assez standard sur bouchée de goût assez standard l'ingurgitant…,
et coufflant très coufflant et enjôquant très enjôquant,
bourratif autrement dit, mais c’est le jeu d’une fois la
décennie, on se l'accorde, beaucoup de gens vraiment inscrits dans
leur siècle le font plusieurs fois par semaine, c’est aussi facile
que Facebook, quand on aime. Quand on ne rêve pas de grosse voiture
ou de tablette, mais seulement de s’arrêter une fois dans sa vie
d'acheter une « pizza pizza bon appétit - pizza pizza bon
appétit...», une fois que c’est fait , que faut-il faire ?
Que font-ils les amateurs, à cet instant ?
« Et
une montagnarde crème 7 fromages pour Monsieur... !», oui,
savoyard je suis, donc, pour ne pas me déterritorialiser…
Imaginons une solution, mais en fait aucun effort,
théoriquement, n’est demandé, l’effort en roulant est de
s’arrêter surtout, de tourner juste là à gauche au rond point,
je sais qu’un peu plus haut je trouverai de l’espace pour
ingurgiter ma prise, de l’espace et de la végétation pour cacher
mon acte s’il le faut, mais évidemment pas de bière pas de
terrasse surtout pas de bistrot, nous sommes partout ici dans des
zones sinistrés, mais le faut-il, le fait que je sorte ma dépouille
brûlante des rails qu’elle même s’est fixée réclame
nécessite-t il un regard un jugement venu d’on ne sait où ?
Un minimum d'exhibitionnisme ? La soirée est toutefois encore
plus belle que prévue, plus que que belle, ciel noir sur les
montagnes (précision à destination de l'esthète potentiel qui
lira ces notes) : bleu de Prusse mêlé à de l'anthracite le plus
pur), sans éclairs, la chaleur n’étant pas à son sommet pour la
saison, blancheur encore de certains arbres printaniers tardifs, en
un mot liberté comme parfois, libéré de son propre poids, le poids
de ses propres contingences…, mais voila je roule tout droit et
emprunte le chemin de ma grotte pour ne pas faillir, ne pas
m’étouffer solitaire sans aide sans bière sans liquide me dis-je
une nouvelle fois, « on ne sait jamais ça serait con de mourir
comme ça !», et perdre bêtement du même coup cet instant
précieux, unique, cet instant qui doit bien être fragile pour être
aussi intense et singulier ? La lumière se modifiant beaucoup
plus vite que ce que nous pouvons en absorber si l’on insiste, et
l’on insiste, je roule donc vers ma grotte et me gare à
proximité...
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