« On
est assis, confortablement, sur ce banc. Lisse et chaud, en fausses planches de
vrai composite utilisées d'ordinaire pour faire du ski nautique. Mes pieds ne
touchent pas terre, mais c'est normal, on flotte déjà, avec le clapotis sous le
ponton. Car devant s'étend "son" lac. Cabane sans murs - à peine un
stock de pierres pour couper le vent et caler la terrasse
supérieure-.Cabane-plancher, cabane pour contempler sa préférence, son enfance,
son adolescence, "c'est là-bas que nous allions nous baigner, et puis plus
tard un peu plus loin ; il ne faut pas craindre ce qu'il y a dessous, car on ne
sait pas trop de quoi il s'agit. C'est vaseux". Mais cabane quand même
tant cet endroit semble protégé et protecteur, une bulle, une chambre à soi,
parce qu'on y est tout entier dedans et dehors.
Contempler
l'enfance de l'autre tout en se faisant ses propres souvenirs par le petit bout
de la lorgnette, l'accompagner là-bas tout en sachant très bien qu'on ne sera
jamais vraiment dans le paysage, puisqu'on n'y a pas habité enfant, qu'on ne
s'est pas réveillé chaque matin avec cette lumière, qu'on n'est pas allé avec
les parents accomplir le rituel du soir. On sait juste qu'on a pris part à la
liturgie du jour, et du maintenant, et qu'on s'est permis d'emporter un peu de
cette lumière calme et large, bleue et limpide, qui lave les poumons, adoucit
les mœurs, élargit les horizons. »
(MpR)
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