« Dans la chine de Mao, un homme tenant un livre à la main dans la rue ne recherchait ni plaisir ni distraction. Il se montrait solidaire de tous les chinois. »
Quel livre ? Celui de Mao. Le petit livre rouge des citations. « Ce livre était la foi que le peuple emportait partout. » Bon dos, exagération pas mal d’imagination mais, a-t-on déjà tenu un livre dans la rue arpentant parépathéticien bridé, à la grande époque.. ? au contraire si le contraire est possible dans un tel contexte le fait de lire lire tout court comme seul solitaire au centre du multiple lecteur seul et silencieux au centre du bruit dans la rue qui est rue parce que foule et foule parce que beaucoup et pas mal à bicyclettes, ne fait que distinguer l’indivisible individu singulier fragile qui lit silencieusement et distingué se distinguant seul au centre d’une masse en indistinction et donc hors norme, pointé seul unique oh unique sa faute, hors foule non protégé cible, car il y a bien il doit bien y avoir un plaisir caché caché au milieu du même à lire comme ceci ?
Ainsi le plaisir de l’aveugle ainsi on ne voit plus rien ainsi on est en soi (même si les aventures narrées du Grand Timonier sont bien au-dessous de toute aventure passionnante), ainsi la pensée voyage (même si…) ainsi on peut se retrouver loin ou du moins sans bouger, de l’autre côté de la rue, dans un autre lit, de l’autre côté des montagnes sur un autre vélo feuilletant encore sa pensée, sa rêverie alors que la main de la milice vous pousse sur le côté, consciencieusement, cherchant un peu plus tard vous cognant contre un casier métallique trainé sur le béton dans la fumée des cigarettes à savoir à voir ce que vous voyiez il y a peu, cherchant à vous faire cracher mais vous ne crachant pas le bon crachat, vos images n’ayant pas le bon rendu vous, ne fournissent pas le bon renvoi, vous ne mourez surtout pas comme il faut en offrant au peuple le vide de votre esprit, l’oreille la tempe posée sur le livre le petit livre rouge à couverture de plastique rouge contenant les citations qui aident à vivre à lire indéfiniment le vide le vide ô pratique car un mot en cache un autre une rêverie en tient une autre sous sa jupe, la phrase peut-être prise à l’envers montrer sa transparence se laisser deviner plus ou moins tout de suite plus ou moins tout à l’heure oh non, pourquoi pas maintenant ?
Moi qui lis plusieurs livres en même temps, je veux dire les uns après les autres en même temps, c’est clair ? c'est-à-dire que je lis, pour éclaircir, le passage de l’un puis saute au passage de l’autre choisissant selon l’humeur la coloration de l’un ou de l’autre, la coloration du moment que c’est vers là par là dans cette direction que tend mon esprit. Mon esprit ? Oui enfin on ne va pas finasser autour de l’esprit en question… et bien et bien, s’installer un peu trop dans le passage de celui-ci équivaut à ne pouvoir que difficultueusement s’attacher à l’autre, de cet abruti pour abrutis il est difficile d’apprécier ou de « rentrer » au pied levé dans un autre surtout s’il n’est pas de ce pays lointain et fort libéral précisément, dont j’obsède mes remarques, si. (…)"
(lire survivre acte de résistance / Olivier Chambole Musigny)
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